Suspension dès juillet 2025 du dispositif MaPrimeRénov’

La suspension prochaine de MaPrimeRénov’, dispositif phare de soutien à la rénovation énergétique en France, révèle une crise majeure de financement et d’organisation dans la politique publique de transition énergétique.
Dès juillet 2025, ce dispositif sera mis en pause jusqu’au 15 septembre 2025, en raison d’un afflux massif de demandes, d’un budget réduit, et de dysfonctionnements structurels.
Cette décision intervient alors que les besoins en rénovation énergétique restent immenses et que les objectifs gouvernementaux sont loin d’être atteints.

Une suspension motivée par un épuisement anticipé des crédits.
Officiellement, les autorités justifient cette suspension par un « encombrement » du système, des délais d’instruction trop longs, et un niveau de fraude jugé préoccupant. Toutefois, de nombreuses voix, notamment au sein du collectif Rénovons, affirme que la cause réelle de cette décision est l’épuisement anticipé de l’enveloppe budgétaire allouée pour 2025.
Ce constat était attendu : dès janvier, plusieurs acteurs du secteur avaient alerté sur le risque de voir le dispositif interrompu au cours de l’année.
Cette situation s’explique en partie par une réduction progressive du budget de MaPrimeRénov’.
Initialement fixé à 4 milliards d’euros pour 2024, il a été successivement ramené à 3 milliards, puis à 2,3 milliards d’euros, dans le cadre des mesures de réduction du déficit public.
Ce montant s’est avéré très insuffisant face à la demande croissante : au premier trimestre 2025, 63 509 ménages ont bénéficié du dispositif, générant 1,4 milliard d’euros de travaux pour 700 millions d’euros d’aides publiques versées. Fin mai, 100 000 dossiers avaient été déposés depuis mars selon l’Anah, l’agence chargée de la gestion du programme.

Un succès paradoxal : une demande record pour des rénovations d’ampleur
Si cette popularité traduit un intérêt croissant des ménages pour la rénovation énergétique, elle met aussi en lumière l’insuffisance des moyens alloués.
Ce succès est principalement lié à l’essor des rénovations d’ampleur, qui regroupent plusieurs travaux simultanés. Celles-ci sont nettement plus efficaces pour lutter contre la précarité énergétique et réduire les émissions de CO₂ des logements.
Sur les 63 509 rénovations subventionnées début 2025, 17 178 relevaient de cette catégorie, un chiffre trois fois plus élevé qu’à la même période en 2024.
Environ 80 % de ces rénovations concernaient des logements classés F ou G, considérés comme des passoires thermiques.

Des alternatives et solutions d’urgence envisagées
Plusieurs propositions ont été formulées pour éviter la suspension du dispositif.
Parmi elles, la réduction du montant maximum de l’aide pour les rénovations d’ampleur ou le renforcement du financement via les Certificats d’Économie d’Énergie (CEE), afin de soulager le budget de l’État. Ces mesures restent cependant insuffisantes, selon les acteurs du secteur, pour combler le fossé entre les besoins exprimés et les ressources disponibles.
Le collectif Rénovons plaide pour une rallonge budgétaire, avec l’ouverture d’un débat parlementaire en vue d’un budget rectificatif, bien que cela s’avère difficile dans un contexte où le gouvernement cherche à économiser 40 milliards d’euros.

Quelles conséquences pour les ménages ?
La suspension de MaPrimeRénov’ aura des impacts directs sur les particuliers :
Les dossiers déjà déposés avant juillet 2025 seront bien traités, mais avec des délais possiblement rallongés.
Les nouvelles demandes sont acceptées jusqu’au 30 juin 2025. Passé cette date, aucune demande ne sera prise en compte avant le 15 septembre 2025 (au plus tôt), sauf si une nouvelle rallonge budgétaire est votée.
Les travaux prévus après juillet seront éligibles à l’aide uniquement si la demande a été acceptée avant la suspension. Dans le cas contraire, les ménages devront patienter ou chercher d’autres dispositifs d’aide à la rénovation.

Une pause qui risque de casser la dynamique de rénovation
Pour les professionnels comme pour les ONG, cette interruption constitue un frein majeur à l’accélération de la rénovation énergétique en France. Alors que le gouvernement vise 900 000 rénovations d’ampleur par an d’ici 2030, seuls 91 374 ont été réalisées en 2024.
La mise à l’arrêt temporaire de MaPrimeRénov’ vient donc entraver une dynamique pourtant encourageante, en particulier dans un secteur clé pour atteindre les objectifs climatiques nationaux.

En conclusion, la suspension de MaPrimeRénov’ traduit les tensions croissantes entre ambition écologique et contraintes budgétaires. Elle révèle aussi la nécessité urgente d’un financement pérenne et adapté, si l’on veut réellement enclencher une transition énergétique à la hauteur des enjeux climatiques et sociaux.